Conseils de Françoise Coulmin : Présidente du Jury 2015

Chers ami-e-s poètes,

Vous vous considérez poètes puisque vous figurez dans cette aventure qu’est le concours Poésie en liberté et donc de fait, vous êtes poètes.

Aussi, donner des conseils me paraît un peu périlleux, car au contraire des conseils d’apprentissages artisanaux de toutes sortes (la cuisine, la menuiserie, la mécanique, etc…) il n’y a pas d’école de poésie et donc pas de recettes, pas de procédés, pas d’astuces, pas de tours de main, pas de trucs poétiques.

La poésie est avant tout la transcription d’un état d’être et c’est cette disposition de l’esprit, ce regard sur les choses, les événements, les sentiments… qu’il s’agit de capter d’abord, de traduire plus ou moins fidèlement ensuite. Exercices difficiles.

La première étape qui fait de soi un poète (de celui qui – même sans créer – est capable d’apprécier l’univers poétique : le lecteur, l’amateur, l’esthète en tous domaines) est de se mettre à l’écoute de ses propres vibrations intérieures, face à l’événement qui éveille en soi une certaine émotion :
– enregistrer les réalités du moment,
– laisser venir – se cognant contre le sujet – les émotions qui résultent du choc.

Quand il semble qu’il y a matière à poème (et tout absolument tout peut être matière à poème, de la poubelle à la plus subtile préciosité), la deuxième étape est de coucher par des mots et des expressions le surgissement de ces résonnances, qu’elles soient minces échos peu perceptibles, grondements joyeux ou révoltés, que ce soit tâtonnement laborieux ou jaillissement lumineux.
Entre alors en scène et devenant priorité le rythme du phrasé, sans recherche particulière d’effets, de rimes (s’ils adviennent on en jugera plus tard) en laissant s’écouler la musique de ce qu’il est nécessaire de dire ou de taire et surtout en modulant l’expression, la basant essentiellement sur le souffle, son propre souffle : court, ample, haletant, saccadé, qui sait bien lui, d’instinct, se coller à l’évocation.

Vient enfin le temps du polissage :
– éliminer les mots faibles, les clichés, les répétitions sauf volontaires, les inutilités, le bavardage,
– utiliser des termes simples mais précis et directement compréhensibles – même inventés.
Laisser alors maturer le temps qu’il faut : une nuit, un an… pour, relisant, éventuellement le gueulant, juger de son poème.

Le temps est lors venu de le soumettre : amis, référents et jurys.

Bien à vous poètes !

Février 2015, Françoise COULMIN

Françoise Coulmin

Françoise Coulmin

Françoise COULMIN, 1941, poète, peintre et géographe, est née et vit en Normandie. Prix international de poésie 2012, Antonio Viccaro. Derniers recueils : Guérir d’enfance, (L’Harmatan, 2012), Pendant qu’il est encore temps, (Le Temps des Cerises, (2012), Petit matin, (La feuille de thé, 2012). Figure dans plus de quarante anthologies et contribue à de nombreuses revues (papier et en ligne), tant en France qu’à l’étranger. Plusieurs collaborations avec plasticiens et compositeurs. A réuni 2 anthologies au Temps des Cerises : Et si le rouge n’existait pas (67 auteurs, 2009) et Nous la multitude, (107 auteurs, 2011). Membre du PEN Club français (Poètes Essayistes Nouvellistes) et de la SGDL (Société des Gens de Lettres).